Albert Rakoto Ratsimamanga (1907 – 2001)

Né le 28 décembre 1907 à Antananarivo, Albert Rakoto Ratsimamanga était le petit-fils du prince Ratsimamanga, oncle et conseiller de la reine Ranavalona III, exécuté en 1897 au début de la colonisation française de Madagascar. Puisant ses racines dans le XIXe siècle malgache, sa vie a été solidaire des grands enjeux historiques et scientifiques de son époque.

D’abord médecin de l’Assistance médicale indigène, il prend conscience de l’immense précarité sanitaire des populations rurales de Madagascar. Accompagnant la délégation malgache pour l’Exposition coloniale de 1930, il continue ses études à Paris et devient docteur en médecine, docteur ès sciences, diplômé de l’Institut de médecine exotique et de l’Institut Pasteur.

Son combat pour la liberté dans un cadre légaliste et pacifiste fut sans relâche. Durant ses années d’études, hantant le quartier latin, Albert Rakoto Ratsimamanga a su tisser des relations étroites avec les milieux intellectuels et politiques français. Il milita au sein de l’Association des étudiants d’origine malgache, puis de l’Association des Malgaches de France dont il fut cofondateur. Il rêvait à l’indépendance de son pays. Mais à cette époque, il s’agissait d’abord de revendiquer l’égalité des droits entre colonisateur et colonisé. En février 1946, le docteur Rakoto Ratsimamanga fonda avec Jacques Rabemananjara, déjà écrivain francophone et les députés Joseph Raseta et Joseph Ravoahangy Andrianavalona (deux médecins de l’AMI déjà impliqués, en 1916, dans l’obscur complot de la VVS), le Mouvement démocratique de la Rénovation malgache (MDRM) dont les statuts seront adoptés, à Paris, en février.

Dès mars 1946, Raseta et Ravoahangy avaient demandé l’abrogation de la loi d’annexion de 1896 et la reconnaissance de la Grande Ile comme un « Etat libre, ayant son gouvernement, son parlement, son armée, et ses finances au sein de l’Union française ».

Avant que cela soit effectif, Il aura fallu 14 ans parsemés de désordres, de nombreux morts et une nouvelle République française. Le MDRM fut jugé l’instigateur et le principal responsable de la sanglante insurrection à Madagascar du 29 mars 1947 à la fin de l’année 1948. Raseta et Ravoahangy seront condamnés à mort et Jacques Rabemananjara, alors député à l’Assemblée Nationale, condamné aux travaux forcés à perpétuité. Plus tard, après une parodie de procès au Palais d’Andafiavaratra, ces peines seront commuées, mais les parlementaires déchus passeront des années en prison ou en résidence surveillée.

Albert Rakoto Ratsimamanga, établi de longue date en France et qui apparemment ignorait tout du soulèvement, ne fut pas impliqué.

À la déclaration de l’indépendance il est nommé ambassadeur de la nouvelle République malgache en France et crée les ambassades en Allemagne fédérale, en U.R.S.S., en Chine, en Corée du Nord et en Sierra Leone.

Il épouse une scientifique française, Suzanne Urverg, qui devient dès lors sa plus proche collaboratrice.

En outre, il représente son pays auprès de l’O.M.S., de la F.A.O.et de l’U.N.E.S.C.O., dont il devient vice-président du conseil exécutif.

Mais Albert Rakoto Ratsimamanga a surtout été un éminent scientifique, de la communauté de pensée des Joliot-Curie, Langevin, Leblond, Nicolle, Minz et bien d’autres.

D’abord assistant à la faculté de médecine de Paris, il est l’un des quatre directeurs scientifiques refondateurs du C.N.R.S. d’après guerre et devient directeur de recherche de classe exceptionnelle. Sa thèse de doctorat en médecine sur la tache pigmentaire congénitale et l’origine des Malgaches consistait en une nouvelle approche d’un problème compliqué. Ses études furent consacrées par un Grand prix de l’Académie des Sciences. Sa thèse principale sur l’acide ascorbique et la fonction surrénale était plus classique, mais elle orienta ses recherches. Recherches fondamentales en France, tout d’abord, débouchant, plus tard sur l’Institut Malgache de Recherches appliquées (IMRA), qu’il fonda à Tananarive (mise au point du vitascorbol). Le docteur Rakoto Ratsimamanga, décédé le 16 septembre 2001, a reçu le suprême honneur des funérailles nationales. Mais, de son vivant, il était déjà une légende vivante.

Ainsi, le Pr Ratsimamanga a porté trois casquettes de son vivant:

Le Scientifique : Albert Rakoto Ratsimamanga s’auréole de plusieurs diplômes et titres dont, entre autres, le Doctorat d’Etat en Médecine, le Doctorat d’Etat ès sciences et le Diplôme de l’Institut de Médecine Exotique. Il fut membre de plusieurs Sociétés Savantes, dont l’Académie Nationale (française) de médecine, l’Académie (française) des sciences, l’Académie Malgache, l’Académie des Sciences de Rome, l’Académie des Sciences du Tiers Monde, l’American Society of Pharmacology, la Société de Biologie, etc. Ce savant féru de recherches est l’auteur de plusieurs travaux scientifiques. Après avoir été Directeur de recherches au Centre National de la Recherche scientifique (France), il créa à Madagascar plusieurs Centres et Instituts de recherches, en l’occurrence le CNRSP (Centre National de Recherches Scientifiques et Pharmaceutiques, l’IMRA (Institut Malgache de Recherches Appliquées).

Le Nationaliste : Albert Rakoto Ratsimamanga fut, en 1935, un des fondateurs de l’AEOM (Association des Etudiants d’Origine Malgache) et déposa lui-même à la Préfecture de Paris les statuts du MDRM (Mouvement Démocratique pour la Rénovation de Madagascar). Ce mouvement fut durement réprimé en 1947 puis, par la suite, dissous. Albert Rakoto Ratsimamanga créa en 1949 le « Conseil National Malgache », sorte de Gouvernement en exil appuyé par l’AEOM. Mais déconnecté du contexte politique malagasy, ce fut un échec.

Le Diplomate : Albert Rakoto Ratsimamanga, malgré ses diverses occupations, a encore trouvé l’occasion de suivre les cours de l’IHEI (Institut des Hautes Etudes Internationales) pendant deux ans et de rédiger un mémoire sur les pays baltes. Il embrassa alors à l’aise la carrière diplomatique ; Ambassadeur de Madagascar à Paris, en République Fédérale d’Allemagne, à Freetown, à Moscou et en Corée. Il fut aussi Représentant permanent de Madagascar auprès de l’UNESCO, membre de la Délégation Malgache à la Commission Mixte Franco-Malgache pour le transfert des Compétences et de Souveraineté à l’Etat Malgache, Expert auprès de la FAO (Rome), membre désigné par le Conseil exécutif de l’UNESCO auprès du Bureau International du Travail à Genève, membre de la Fondation Nationale de l’Enseignement Supérieur de la Communauté, Vice-président et membre permanent du Comité pour la Recherche Scientifique de l’Organisation de l’Unité Africaine (Alger), Vice-président du Comité Exécutif du Haut-commissariat pour les Réfugiés, etc. De tout ce qui précède, la 2ème Promotion du CEDS tout en prenant comme modèle de vertu le Professeur Albert Rakoto Ratsimamanga, rend également hommage à sa veuve Suzanne Ratsimamanga, née Urverg, Professeur de Biochimie à la Faculté de Médecine de l’Université d’Antananarivo et membre du Conseil d’administration de l’IMRA d’Avarabohitra Itaosy.

Ses Publications:

  • Acide ascorbique et travail musculaire, Chatenay, 140 pages, – Éditions Paris
  • Les plus beaux écrits de l’union française, Paris, 240 pages – Éditions de la Colombe
  • Acide ascorbique, Paris, 250 pages, Hermann et Cie Éditions
  • Histoire des Littératures Encyclopédiques de la Pléiade, littérature orale, vol. Éditions Gallimard, Paris 1940
  • La vitamine C Encyclopédie Médico-chirurgicale (1958)
  • Les triterpénoïdes en chimie physiologie végétale et thérapeutique, 1 385 pages – Éditions Gauthiers Villars Paris-Churchill London
  • Nouveaux catalogues des plantes médicinales malgaches (noms scientifiques et vernaculaires de 43 600 espèces (268 pages) une volume de 1972)
  • Éléments de pharmacopées malgaches, 350 pages – Imprimerie nationale de Madagascar (1963)
  • Rapports d’activités officiels destinés au Gouvernement : de 1960 à 1974 : 10 tomes de 56 pages chacun
  • Plus de 350 publications scientifiques dans diverses revues depuis 1933, en particulier de l’Académie des sciences de Paris
  • Une centaine de conférences et de discours politiques et diplomatiques.

Sources: Encyclopeadia Universalis, Wikipédia, madagate.com

A lire aussi: Suzy Andrée Ramamonjisoa,

 Ratsimamanga et moi, http://www.bibliothequemalgache.com/pdf/BMC03.pdf